Cela faisait plusieurs mois que
j’ai délaissé ma plume, que je me suis concentré sur mon évolution en tant que runner en oubliant de
partager ma passion à travers l’écriture, mais cette fois-ci j’ai le sentiment
de devoir décrire cette expérience, de la revivre, de la transmette, de la
partager…
Retour sur les terres où tout a commencé...
Retour à ces routes qui m’ont transmises le virus de la course, à ces
chemins de terres qui m’ont forgé le caractère, à ces montagnes qui ont fait de
moi ce que je suis, à cette bande de coureurs que je ne connaissais pas et qui
m’ont tellement appris.
Pour la première édition, je me
suis présenté en « novice » face à ces routes exigeantes ; la
deuxième édition, c’est en « coureur en apprentissage » que j’ai
défié les différentes montées du parcours ; cette année, c’est en « marathonien »
que je suis venu affronter ces montagnes de Zaghouan.
Que du chemin parcouru depuis 3
ans, plus de 2500 kilomètres dans les jambes, une vingtaine de participation
aux différentes courses, un marathon, des émotions et des amis, beaucoup d’amis
qui partagent cette passion. Mais c’était là que tout a commencé, c’était là
que le coureur qui est en moi est né.
Comme d’habitude
Je me suis levé
très tôt mais difficilement, pour enfiler mes vêtements de course et pour
prendre un bon petit déjeuner qui est essentiel pour une bonne course, car derrière
la tête, j’avais une idée que j’avais concoctée durant la nuit ; j’allais
aborder cette sortie comme une vraie course chronométrée, je voulais savoir ce
que j’avais dans les trips, jusqu’où je pouvais aller en conditions difficiles.
J’ai pris la route avec mon
compagnon de toujours, cette route qui regorge d’histoire et que chaque
kilomètre est un plaisir pour les yeux. Arrivés sur les lieux, nous avons pris
notre temps de saluer tous ces coureurs qu’ils y a deux ans nous ne connaissons
pas et qui sont aujourd’hui de véritables amis mais notre respect et admiration
pour leur performance, leur courage et leur générosité sont toujours aussi
grands. L’ambiance était chaleureuse et festive, beaucoup de nouveaux visages
sont présents, ils appréhendent cette épreuve, et moi qui se trouve maintenant
dans la peau d’un ancien (hé ouai), je prends le temps d’expliquer le parcours
et d’orienter sur les difficultés qui peuvent être rencontrées.
Le départ approche
L’adrénaline
monte chez tous les coureurs mais cela n’empêche pas d’observer une minute de
silence en hommage à Si Slim ABDENNBI, je saisis l’occasion pour dire
que ce grand monsieur qui ne me connait sans doute pas mais que je connais de
vue a été pour moi le premier contact dans ce monde de running, je l’ai
rencontré lors de ma première inscription pour les foulées du lac en 2012, il a
été tellement gentil et m’a tellement appris sur cette communauté en 5 min que
j’ai tout de suite adhéré, j’ai senti une ferveur dans son message, une
sincérité dans ses paroles et que ce monsieur vivait pour le sport et que c’est
à travers toutes les photos qu’il a pris la peine de partager sur les
événements qu’il parcourt que j’ai découvert l’extraordinaire ambiance de cette
activité. C’est en suivant son exemple que j’ai créé la page « Running
Team Tunisia » et que j’ai commencé à écrire pour transmettre les moments
de joie que me transmet le Running. Un grand monsieur est parti, mais le combat
de sa vie pour la promotion du sport a été une sacrée réussite et c’est pour
cela qu’on ne l’oubliera pas.
Après les émotions de l’hommage
et de l’hymne national, l’émotion du grand départ, il fallait commencer sur un
bon rythme, j’avais tout la parcours en tête, je connaissais le profil et
j’avais ma tactique, il fallait gagner un peu de temps sur le faux plat montant
des 3 premiers kilomètres, assurer sur les grosses montées des 5 suivants et se
laisser entraîner par la longue descente de 8 kilomètres jusqu'à
l’arrivée ; mais bien sûr tout cela n’est que la théorie.
Le temps était propice pour une bonne performance,
Le ciel était couvert mais la température était
agréable, il ne faisait pas froid. Les trois premiers kilomètres étaient
vraiment spéciaux, entre les coureurs qui partaient pour faire une performance
et les coureurs qui sont partis pour une partie de plaisir, j’étais en
« chasse patate » entre les deux, je pouvais suivre les premiers mais
je voulais tenir mon rythme et j’entendais les derniers derrière moi entrain de
rigoler, à deux reprises j’avais la tentation de baisser le rythme et de
rejoindre le groupe qui s’amuse et passer une journée facile mais j’ai réussi à
me contrôler et à tenir mon rythme, le passage du goudronné à la piste m’a
remis dans l’esprit du trail, il y avait la boue, le sol glissant nécessitait
une concentration extrême et les montées arrivent rapidement, le souffle
commence à s’accélérer, j’espère que je ne suis pas parti trop vite, mais le
soleil qui commence à montrer le bout de son nez me réchauffe le cœur, les cristaux
qui scintillent sur le sol boueux me forgent l’esprit, je me booste en pensant
au beau petit lac que j’allais rencontrer sur mon passage et en faisant bonne
mine devant une amie photographe, mais le lac n’était plus là (la sécheresse
devient visible sur notre pays et c’est bien dommage). Dépassant le lac qui
n’était plus là, je retrouve un bon rythme, je commence à dépasser quelques coureurs
dont une légende « le kayd »,
j’ai pris mon temps dans le premier ravitaillement vu que je n’ai pas emporté
d’eau et le kayd en profite pour reprendre sa place naturelle devant moi,
ensuite commence une longue série de montées et descentes, je devais avoir pris
un bon wagon puisque je ne double personne malgré que je cours un rythme
vraiment élevé et que j’étais bien niveau souffle et muscles, au kilomètre 7,5
arrive la grande montée du circuit, le véritable test, je me rappelle tous ces
vendredis à l’aube où on parcourt les montées de la Rabta et d’El Malassine
avec les tarés de l’FEMR et je regarde cette pente avec défi et je commence la
montée, je cours quand les autres marchent et je repasse mon ami « el
kayed », malgré tout, c’était difficile à la fin et je m’encourage en me
disant qu’après c’est fini, il y a la descente.
Ça y est, c’est fini...
Je n’avais
qu’a gérer mes efforts jusqu’à l’arrivée, le plus dur est passé, je regarde le
paysage fleuri, les pleines vertes et brillantes qui m’entourent, la montagne
bienveillante qui nous observe de loin, cela a une incidence sur ma cadence, « le
kayed » repasse encore, je regarde ma montre, je me concentre sur mon
rythme de croisière, j’étais bien, j’étais heureux. Mais surprise une longue descente suivie d’une
montée sèche et longue derrière se profile à l’horizon, j’avais mal calculé mon
coup alors, j’avais crié victoire trop vite, je me re-concentre, je relâche
tous mes muscles dans la descente et je
prends la montée tambour battant, c’était sur que c’est la dernière du jour, et
je repasse mon ami du jour encore une fois.
Au dixième, le ravitaillement
J’ai pris deux gorgets et je reprends, mais surprise « el kayed »
prend le large avec d’autres concurrents, c’était une descente technique et
très plaisante, avec beaucoup de virages, j’ai eu un immense plaisir à
accélérer et à prendre la corde des virages, il y a même un ruisseau à
enjamber, mais je ne gagnais rien sur mes concurrents du jour.
Cette partie fort plaisante
terminée, on longe maintenant un chemin historique, quel bonheur de courir à
coté de ces ruines millénaires, les aqueducs qui conduisaient l’eau de zaghouen
vers les hautes pleines de carthage, on se sent tout petit face à la grandeur
de nos prédécesseurs, mais la boue a gâché ce plaisir, il fallait se concentrer
une fois encore, pour éviter de glisser, pour choisir sa trajectoire, pour ne
pas baisser le rythme. Je m’approche rapidement des autres coureurs, j’en
dépasse quelques uns même, et je talonne de plus en plus mon
« kayed ».
Fin de la piste, retour au
goudronné, un bénévole m’annonce 300 mètres de l’arrivée, j’accélère je
m’approche du « kayed », il accélère, il donne tout ce qu’il a, je
suis juste derrière, je suis bien, très bien, il reste 150 mètres, c’est
maintenant que je dois donner l’accélération finale, la dernière attaque, je
l’avais dans les jambes, je connais mon potentiel, je connais mon corps, les
spectateurs attendaient devant la ligne, c’est maintenant ou jamais. Mais non,
je n’ai pas attaqué, je suis resté juste dernière, honneur à nos anciens, à nos
maitres, à nos légendes, j’ai encore le temps.
A l’arrivée,
Je prends le temps
de me ravitailler par les spécialités locales (mais il ‘y avait pas d’eau), de
saluer mon concurrent du jour sans savoir s’il a vécu sa course comme la mienne,
ou que tout le film de cette course est dans ma seule tête, et j’ai attendu
tous mes amis sur la ligne jusqu'au dernier. Ensuite beaucoup de joie et de bonne
humeur, avec des chansons, de la danse, des rires, brefs de moments de partage
qu’on ne peut pas décrire et qu’il faut vivre pour les ressentir.
C’est fini. Non. De retour à la
maison, j’ai vu que tous les participants partageaient les photos et
décrivaient leurs émotions et cela tout le long de la journée. Il ya deux ans,
on était quarante coureurs, maximum cinquante, hier on était plus de deux cents
à vivre cette expérience ; et ci c’était ça la véritable victoire.
« Ska »
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