13 avr. 2017

Le Marathon de Paris 2017...ensemble d'un bout à l'autre!




J'ai commencé l'écriture de cet article en rentrant de Paris...le soir en arrivant à la maison, j'ai regardé la vidéo résumé de ma course proposée par Asics et j'ai aussi repassé les photos...les souvenirs et les "émotions" sont devenus plus claires, j'ai eu des flashs sur des blancs que j'avais et des sensations que je n'ai pas comprises...j'ai relu mon début de récit et je ne me suis plus retrouvée dedans, je rembobine et je reprends...

La veille du marathon, j'ai publié un article ici pour parler de la préparation, de mon état d'esprit...je disais que je me sentais sereine, sereine parce que quoi qu'il se passe j'avais tellement appris durant cette phase de préparation que tout le reste serait du bonus...la cerise sur le gâteau. Je n'étais pas déterminée et donc stressée par rapport à l'objectif "numérique"que je ne m'étais pas forcément fixée...

Je m'explique: faire un chrono entre 3h30 et 3h35 sur la distance mythique de 42.195 km ne m'a jamais effleuré l'esprit. Pourquoi faire?! Mais Aymen et Mohamed y tenaient. Je suis le plan parce que cela m'amuse et parce que j'aime repousser mes limites. En partant à Paris j'avais plus de projets de détente et de vagabondages qu'une envie de faire ce chrono. Chaque jour lors de la dernière semaine je posais la même question à Mohamed (puis quand je sentais que ça allait l'énerver, je me suis tournée vers Aymen) tu es sûr qu'on va courir à cette allure? La réponse était toujours la même : "oui" en changeant de sujet tout de suite après.
La veille au salon...est ce que j'ai l'air de quelqu'un de sérieux...de concentré...

Pour être honnête, j'évitais d'y penser. Les 3 jours qui ont précédé le marathon mis à part une alimentation équilibrée et une bonne hydratation j'ai fait un peu n'importe quoi: pas assez dormi, trop marché, mis de nouvelles chaussures qui m'on serrées à avoir des fourmillements... Le soir qui précède la course, juste avant de dormir, j'ai stressé : comment convaincre Mohamed de faire sa course et de me laisser faire la mienne. J'étais prise au "piège" mais ce qui est fait est fait!

Le matin je me réveille, je suis en super forme et très joyeuse. Je prends mon temps... on arrive même en avance au point de RDV ce qui n'enchante pas trop Mohamed (voire pas du tout). Bizarrement je ne stresse plus, non pas parce que je suis confiante mais parce que je n'ai plus le choix.

Allez! Le groupe se rassemble petit à petit, le stress des autres me fait rigoler (ce n'est pas méchant mais ça me rappelle mon état il y a 2 ans, j'ai vécu un grand moment de solitude et un sale quart d'heure, perdue au milieu de Paris et de 50000 coureurs). On prend des photos, on dépose nos affaires et mon téléphone avec (les gels et l'eau ont pris toute la place). On fait la queue devant les WC (passage obligatoire) je me dis : il y a 2 ans je n'ai pas fait de pause wc pendant le marathon je n'en ferais pas aujourd'hui. Pas question de perdre des minutes. On rejoint le SAS en s'échauffant sur la distance pour arriver pile poil avec le départ. Il y avait une vraie foule partout. Les garçons pensaient que ça finirait par se disperser mais je les prévient que non. Ils ne m'ont pas cru bien sûr (Balti et Mohamed : je l'ai vu sur votre visage mais je n'ai pas insisté). D'après le bracelet d'allure il fallait faire 4'58 au km pour arriver au bout de 3h30. Au moins en courant à cette allure ça passera vite. C'est quand même une bonne chose....
Juste une idée sur le monde...

Top départ, montre et musique...

J'ai oublié de mentionner que l'objectif non numérique est de faire la course de bout en bout ensemble : Balti, Mohamed, Skander et moi (Même si la veille Skan nous avait fait part du fait qu'il a révisé son objectif).

Début de la course et jusqu'au 17ème kilomètre tout va bien, j'ai l'impression de voler, on croise Amira que je connais à travers le blog qui nous tient compagnie, je suis contente...mon cardio est à 166 mais je ne suis ni essoufflée, ni en détresse. Soudain, un point de côté...je n'ai jamais de point de côté depuis le lycée (j'en ai eu un lors d'une séance d'entraînement mais ce jour là, j'ai tout fait pour que ça arrive et il m'a collé toute la séance d'entraînement). Je respire, j'appuie sur le côté opposé, je ralentis, je me fais bouffer par la foule, les garçons sont entrain de chanter des trucs de foot Skan et Wassim d'un côté, Balti et Mohamed de l'autre. Et moi je galère. Je freine dans ma tête mais j'accélère dans ma foulée pour les rattraper. Rien ne va. J'ai envie de pleurer. Mohamed finit par se retourner mais il ne lit pas la détresse sur mon visage, ce qui m'agace (en revoyant les photos je comprends)...je les rattrape enfin, je leur demande de foncer car j'ai le sentiment que je vais les ralentir...Prise de tête en plein marathon. Je me la boucle et je cours. Le point de côté finit par passer au bout de 2 km je crois. Je finis le premier semi en forme. Je suis heureuse d'être là avec mes co-équipiers.


Jusqu'au 22ème rien à dire. Mais là, je commence à avoir mal, point de côté, un tendon près du genou (je cours mais je n'arrive plus à plier la jambe), omoplates, pieds (quelle idée de mettre des chaussettes neuves). Dans ma tête je me disais : c'est le mauvais sort qui se retourne contre toi, tu as abandonné les chaussettes qui t'ont accompagné 72 km sur la saintélyon avec 0 ampoules, tu n'as que ce que tu mérites. Tu vas sentir tes pieds brûler et continuer à courir sans te plaindre. J'avais envie que la foule me bouffe pour que les garçons ne puissent plus me voir, comme le petit poucet.

Le 2ème semi n'était pas facile, je le savais. Les rues sont moins grandes, le passage sur les quais, sous les ponts, des montées...la concentration doit être au top...j'essaie de me laisser entraîner par la musique  mais rien n'y fait, impossible de se concentrer dans tout ce vacarme. La seule chose que j'arrive à faire c'est d’accélérer sous le premier tunnel : je connaissais cette difficulté du parcours et je savais que les garçons n'allaient pas aimer j'accélère donc pour pouvoir en sortir rapidement. Mais là je n'en peux plus, j'ai 2 points de côté.
En approchant du 30ème je comprends enfin la cause de ces douleurs : c'est l'eau froide...et puis je n'avais pas l'habitude de boire aussi rapidement d'aussi grande gorgées. Dit comme ça, vous pouvez vous dire, elle fait sa chochotte mais je vous assure à partir du moment où j'ai compris le truc, j'ai recommencé à boire dans ma petite bouteille dont l'eau était super chaude je n'ai plus eu de point de côté du tout. J'ai eu soif, je me retenais mais c'était plus simple qu'avoir des points de côté. Mais la douleur dans ma jambe est insupportable. Je cours à côté de Mohamed au 32ème. Je lui dis : "écoute, je souffre, laissez moi" (en fait j'avais fait les calculs dans ma tête je finirais en 3h40 et je serais heureuse). Mais il me dit : "cours et ferme là".
Je prends alors mon gel un doliprane et je cours....en ayant l'impression d'être un balai et en priant très fort que le doliprane fasse effet. Au 35ème, je me sens mieux, je pense à Aymen, pour lui je dois m'accrocher à ce chrono, à Iheb, qui aurait aimé être là, je souris pour la photo, je me concentre. Je n'ai pas pensé à abandonner, hors de question. Mais juste marcher une centaine de mètres, j'ai tenté de le faire mais une fille à côté de moi, m'a prise la main et m'a dit : just jog ok? just jog! 

On rencontre des coureurs du groupe qui n'avaient pas l'air d'être au top. Mohamed essaie de les pousser par des mots d'encouragement et moi j'essaie de montrer un air confiant et serein. Je regarde Balti qui a l'air de s'épuiser. Il fait chaud et j'ai soif. Mes à cette allure, les kilomètres défilent rapidement, nous sommes au 40ème. Plus que 2 km. Ces 2 km seront pénibles. Mais l'heure n'était plus à la plainte, ni à regarder l'allure que je n'arrivais de toute manière pas à baisser, je n'étais pas essoufflée mais raide. Je ne saurais pas vous décrire ce qui s'est passé sur ces 2 km, j'ai couru, j'ai dépassé des coureurs, cherché la force dans des images...visualisé les séances de fractionné, la souffrance de certaines répétitions pour banaliser celle que je ressentais...
Est ce que nous avons l'air d'avoir fait un marathon? 

Je lève la tête je vois la ligne d'arrivée, Mohamed qui accélère, Balti qui essaie mais je voyais sa foulée déséquilibrée...Mohamed se retourne, prend Balti dans ses bras, j'arrive....c'est fini, j'en oublie même d'arrêter le chrono! Je marche, je boîte, j'enlève mes chaussures...je veux de l'eau...mais il faudra marcher encore...le tee shirt, puis la médaille...on va chercher le sac...les photos...on se retrouve avec les autres coureurs.


Bonheur, émotion...pas encore mais le défi est relevé dans la souffrance intérieure. Parce qu'aujourd'hui mon corps a décidé de me faire défaut. Je n'ai pas eu de crampes mais j'ai eu d'autres soucis que j'aurais pu éviter si j'étais plus concentrée su ma course. Si je n'avais pas fait autant d'erreur de débutante : les chaussettes, l'eau... La douleur au genou, je ne l'ai jamais eu avant.



Il me faudra 24 h pour réaliser pourquoi c'était dur et désagréable : la foule m'a, nous a bouffé notre énergie, notre concentration, le fait de zigzaguer...cela n'enlève rien au fait que je sois heureuse, heureuse d'avoir relevé le défi, heureuse d'avoir 2 co-équipiers du tonnerre que je ne remercierai jamais assez...je vous aime très fort !

Quand j'ai regardé la vidéo et les photos, j'ai juste vu une personne en forme, qui courait à l'aise alors qu'à l'intérieur j'ai souffert. Ma courbe de fréquence cardiaque prouve à quel point j'étais bien. On dit que je transmets la quiétude...je ne me trouve pas du tout calme, ce dimanche sur les rues de Paris, il y avait au moins 3 voix en moi, les 3 étaient positives et motivantes mais j'aurais cru que mon visage serait rouge et mon dos courbé...

Un special thanks à Aymen (maintenant tu seras la seule personne qui aura le droit de m'imposer tes programmes), au plus merveilleux des kinés Daly (je te promets de diminuer la charge), à mes parents et à tous les membres du Running Club Tunis, vos messages, vos voeux, chaque mot est une source unique de motivation!

C'était une belle expérience mais je ne referais plus le MDP et je ne le recommanderais pas tant qu'il y aura autant de monde.

J'ai passé la journée de dimanche à marcher presque à cloche pied tellement mon genou me faisait mal mais je me suis réveillée lundi à 7h du matin ou peut être avant sans aucune courbature contrairement aux 3 précédents marathons (je suis même allée acheter des croissants) ...mystère...

Je fêterai bientôt mes 36 "printemps" comme on dit, mais désormais ce n'est pas l'âge qui me fait grandir ou prendre de l'assurance, ce sont les courses...

Au prochain défi...sûrement pas sur une route, ni à Paris...



9 commentaires:

  1. J'ai pris un plaisir fou à lire cet article, en voyant tes photos c'est vrai qu'on ne se doutait pas du tout de ta souffrance. Très beau témoignage! J'ai hâte de suivre ta prochaine préparation! Encore bravo Heifa, et bravo à ce très beau trio!

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    1. Merci Amal :) Effectivement moi même ça m'a fait très drôle de regarder les photos :)

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  2. I loved every word of this! And yes, you do look very comfortable :D
    Congrats ��

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    1. ca fait toujours plaisir de lire tes articles heifa , je suis vraiment fier de toi ! tu as pu surmonter tous ces difficultés , tu es une source d'inspiration et un exemple à suivre !! Bravo encore une fois !

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    2. Merci Wajdi d'être si fidèle à mes articles ! Ce que tu me dis me fait très plaisir et me touche beaucoup!

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  4. Chère Heifa tes récits sont toujours captivants. Ce que j'en retiens c'est qu'on peut penser maîtriser les choses mais en fait on apprend toujours de ses expériences.

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    1. Merci pour la lecture... on ne finit jamais d'apprendre... et celui qui croit tout savoir est celui qui a le moins appris :)

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